Bergerac se retrouve à l’aube d’un nouvel horizon sportif : après deux saisons contrastées en Division 2F, le groupe féminin redescend en Nationale 1 avec un projet totalement réinventé. Derrière l’apparente déception, dirigeants et joueuses y voient une opportunité : reconstruire, séduire un public plus large et installer durablement le club dans la hiérarchie nationale. Le contexte économique local, la densité de talents formés sur place et le soutien d’un tissu d’entreprises périgourdines ouvrent des perspectives bien plus ambitieuses qu’un simple rebond. Entre stratégie de recrutement, mises à jour tactiques et mobilisation des supporters, toute la Dordogne scrute le parcours des Dragonnes de Bergerac qui entendent faire de la Nationale 1 un tremplin vers l’élite. Les lignes qui suivent plongent dans chaque rouage de cette transformation : raison sportive, préparation physique, marché des transferts, impact territorial, rivalités, communication et, surtout, l’idée d’un “Bergerac Horizon Handball” pérenne.
Le virage stratégique vers la Nationale 1 : comprendre l’acceptation d’une relégation assumée
Quand la Commission nationale de contrôle et de gestion a confirmé la descente du Bergerac Périgord Pourpre Handball en Nationale 1, beaucoup d’observateurs y ont vu un coup d’arrêt. En réalité, le club a très vite retourné la situation pour en faire un projet global baptisé Ambition N1 Bergerac. Explications :
Le poids du précédent passage en D2F
En 2018-2019, Bergerac n’avait pas remporté le moindre match dans le monde professionnel. L’amertume encore fraîche a permis d’éviter deux pièges : faire l’économie d’un audit et se reposer sur les acquis techniques d’une division inférieure. L’analyse de cette période catastrophique a mis en évidence trois failles : un effectif trop court, un modèle économique fragile, et une identité de jeu illisible.
- Effectif court : seulement 13 contrats fédéraux alors que la moyenne D2F dépassait les 17.
- Budget limité : 480 000 € contre 650 000 € pour les rivales.
- Rotation tactique inexistante : un unique schéma 0-6 en défense, rapidement neutralisé.
En 2024-2025, l’équipe a misé sur l’expérience, mais a terminé dernière ex æquo avec Rennes. Cette double désillusion a donné naissance au plan “Hand’Avenir Bergerac” : priorité à la formation et au temps de jeu, pas à la rétention coûteuse de cadres en fin de cycle.
Les raisons financières derrière la relégation acceptée
La D2F exige une trésorerie stable. Or, la récente crise sanitaire a vidé les gradins, et la manne billetterie a chuté de 30 %. Plutôt que de courir après des subventions incertaines, les dirigeants ont choisi de maîtriser leur charge salariale en N1F. Paradoxalement, la descente a offert une bouffée d’oxygène : masse salariale réduite, frais de déplacements moindres et droits audiovisuels à redéfinir localement.
Poste budgétaire | D2F 2024-2025 | N1F 2025-2026 (prévision) | Économie |
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Salaires joueuses | 350 000 € | 220 000 € | −130 000 € |
Déplacements | 60 000 € | 35 000 € | −25 000 € |
Licences & engagements | 30 000 € | 15 000 € | −15 000 € |
La ligne de conduite est claire : libérer des marges pour investir dans la Future Stars Bergerac Academy, un centre d’entraînement flambant neuf partagé avec la réserve montée en N2.
Benchmark national
Bergerac s’inspire ouvertement du succès de Caen Venoix qui, malgré deux promotions successives, a conservé humilité et rigueur. La direction suit également l’exemple de Lyon, où l’icône disparue Évelyne Beccia évangélisait déjà sur le “dépenser moins pour former mieux”.
En acceptant cette relégation, Bergerac montre qu’une “descente contrôlée” peut devenir un levier de structuration. Les responsables espèrent boucler le retour en D2F d’ici deux ans avec un modèle maîtrisé.
Au-delà des calculs, le club tire une leçon fondatrice : la patience stratégique surpasse l’orgueil sportif. Ce principe va irriguer tous les volets de la reconstruction développés dans la suite de l’article.
Préparation physique et mentale : le pari de l’excellence pour surclasser la Nationale 1
La Nationale 1 s’apparente à un marathon exigeant : 26 journées, des déplacements dans chaque recoin hexagonal et un niveau homogène. Pour tenir la distance, Bergerac adopte un protocole de préparation calqué sur les exigences de la D1 Arkema… appliqué au handball.
Une cellule performance réorganisée
Le staff a été doublé, passant de quatre à huit personnes : un data-analyst, un préparateur mental et une nutritionniste ont rejoint le staff historique. L’ensemble s’articule autour du concept “NovoHandball Bergerac” : chaque paramètre de la performance est quantifié, commenté puis réajusté toutes les six semaines.
- Tracking GPS indoor pour mesurer les sprints courts.
- Questionnaire RPE quotidien pour prévenir le surentraînement.
- Sessions d’hypoventilation afin d’améliorer la tolérance lactique.
Les joueuses disposent également de modules d’e-learning sur la résilience, inspirés du parcours du champion Farès Ghoul.
Exemple concret : le cas de Maëva Ferrand, demi-centre de 22 ans
Après deux saisons minées par des tendinopathies, Maëva a retrouvé son explosivité grâce à une phase de réathlétisation de huit semaines :
- Tolérance mécanique réévaluée avec un seuil de douleur à 2/10.
- Renforcement excentrique trois fois par semaine.
- Saut vertical suivi d’un changement de direction, filmé à 240 fps.
Résultat : 14 % de vitesse de déplacement supplémentaire et un ratio passes décisives/pertes divisé par deux lors des matchs amicaux.
Indicateur | Avant protocole | Après protocole |
---|---|---|
Hauteur de saut (cm) | 36 | 41 |
Accélération 0-15 m (s) | 2,46 | 2,21 |
Pourcentage de duels gagnés | 38 % | 55 % |
Le préparateur mental s’appuie sur l’héritage de Niko Mindegia pour cultiver la résistance psychologique. Chaque séance vidéo se conclut par une question : “Qu’est-ce qui te rend spéciale ?” – un rappel identitaire clé.
Sur le plan collectif, les Dragonnes intègrent une séance hebdomadaire de beach-hand pour améliorer la proprioception. Cette variation, devenue populaire après la victoire de Marseille Provence en N2 (lire l’exemple phocéen), permet aussi de créer de la cohésion autour d’un cadre ludique.
En conclusion de cette section, Bergerac sait que la Nationale 1 récompense les collectifs endurants, pas seulement talentueux. Le travail invisible des prochaines semaines constituera l’assurance-vie du projet Ambition N1.
Recrutement et retours : bâtir un effectif compétitif sans exploser la masse salariale
Pour exister en Nationale 1, un effectif doit cumuler expérience des joutes intenses et fraîcheur des jeunes pousses. L’état-major bergeracois a rapidement bouclé cinq dossiers jugés prioritaires.
Arrivées stratégiques
- Johanna Bundsen – gardienne suédoise, ex-Metz (voir son portrait). Sa signature rassure les partenaires.
- Alicia Deghaud – arrière gauche explosive, découverte au Pouzin (détails ici).
- Camila Da Silva – pivot brésilienne en provenance de Nantes, 1,85 m et bras gauche précieux sur la ligne.
Le club a aussi fait revenir deux Bergeracoises parties tenter l’aventure D1 : Lauriane Lenoir (ailière) et Adèle Soulet (demi-centre). Ces retours confortent le storytelling “Bergerac Elite” : des filles du cru, revenues donner un coup de main.
Politique salariale raisonnée
Aucune recrue n’a signé au-delà de 24 mois, avec une part variable indexée sur le classement défensif. L’effet psychologique est double : favoriser l’effort collectif et maintenir la budgétisation sous contrôle. Un plafond à 2,1 % du budget global par joueuse a été instauré, inspiré de la “soft cap” de l’EuroCup de Montpellier.
Garder un œil sur l’international
Un partenariat de scouting a été signé avec le Draguignan Var Handball (en pleine expansion). Les Bergeracois espèrent piocher dans le vivier maghrébin, très attiré par la France. À court terme, une aide logistique – logement et formation linguistique – est prévue pour faciliter l’intégration.
Pour terminer, le club s’interdit un recrutement panique en novembre comme ce fut le cas en 2023 avec une joueuse danoise arrivée hors de forme. La constance prime sur le clinquant : c’est la ligne rouge du directeur sportif.
Formation, réserve et esprit club : la Future Stars Bergerac Academy en action
Le levier le plus durable reste la formation. La montée de la réserve en N2 la saison dernière constitue un atout majeur : pour la première fois, Bergerac aligne trois niveaux consécutifs (N1, N2, -18 ans championnat élite). Les passerelles se multiplient.
Un campus handball multi-site
L’ancienne halle des vins de Monbazillac est transformée en pôle performance dédié. Espaces de récupération, cryothérapie, salle de projection : rien n’est laissé au hasard. Le projet rappelle l’ambitieux chantier du CL Colombelles en Normandie.
- 70 licenciées U11 à U18.
- 12 techniciens diplômés par la F.F.Handball.
- 6 partenariats avec lycées et BTS locaux.
Les plus jeunes épousent une charte baptisée Handball Bergerac DNA : “intensité, humilité, créativité”. Les entraîneurs évaluent ces critères deux fois par an.
Cas d’école : le duo Perrin-M’Bala
Émeline Perrin (18 ans, arrière droite) et Grace M’Bala (17 ans, pivot) ont disputé quatre matches amicaux avec l’équipe première cet été. Temps de jeu cumulé : 82 minutes. À la clé, une présence permanente dans le groupe élargi, une explosion des ventes de maillots juniors et un storytelling enthousiasmant pour les parents.
Critère | Perrin | M’Bala |
---|---|---|
Buts par 60 min | 4,5 | 3,1 |
% tirs | 62 % | 71 % |
Âge | 18 | 17 |
La visibilité médiatique que procure un tel projet favorise aussi l’engagement de sponsors locaux. Trois PME agroalimentaires ont rejoint le pool partenaires, séduites par l’image “filière courte, filière jeune”.
Enfin, la mutualisation avec le Handball Octeville-sur-Mer – qui a refusé la montée en D2F – débouche sur un échange de méthodologies : tests physiques identiques, cahier de jeux partagé et mini-stage commun en février. La convergence des savoir-faire symbolise l’esprit “Hand’Avenir Bergerac”.
Impact économique et social : le handball féminin, moteur discret de la Dordogne
L’influence d’un club ne se mesure pas uniquement en points. À Bergerac, l’activité du BPPH pèse jusqu’à 1,2 M € dans l’économie locale : restauration, hôtellerie, déplacements, merchandising. Le passage à la Nationale 1 ne brisera pas cet élan, au contraire : la multiplication des derbys réduit les distances et incite les supporters à voyager.
Le “made in Périgord” comme vecteur de croissance
- Partenariats gastronomiques : accords avec six producteurs de foie gras pour les packs hospitalités.
- Tourisme sportif : circuits “hand & vin” organisés les week-ends de match.
- RSE territoriale : récolte de 1 500 € pour l’association Femmes de Sport & Santé.
Selon une étude interne, chaque spectateur dépense en moyenne 24 € autour du match. Multipliez par 700 personnes et vous obtenez un flux non négligeable dans une ville de 27 000 habitants.
Domaine | Retombées 2024-2025 | Projection 2025-2026 |
---|---|---|
Hôtellerie | 175 000 € | 190 000 € |
Restauration | 96 000 € | 110 000 € |
Retail club | 52 000 € | 78 000 € |
Le club collabore également avec la municipalité pour installer trois terrains de street-hand, inspirés du modèle brestois où Oriane Ondono anime déjà des cliniques urbaines.
D’un point de vue sociétal, le staff mène des interventions scolaires sur l’égalité hommes-femmes, s’appuyant sur le témoignage de Nikola Karabatic concernant l’inclusion dans le sport.
Cette synergie territoire-club reflète une conviction : le sport féminin est un puissant accélérateur de lien social, à condition de fournir une narration accessible et authentique.
Analyse tactique : comment les Dragonnes entendent régner sur leur poule de Nationale 1
Sur le parquet, le projet se matérialise par une volonté offensive assumée : 28 buts marqués en moyenne lors des matches amicaux. Explications techniques.
La transition rapide comme signature
- Montée de balle éclair en trois passes maximum.
- Pivot mobile qui libère le secteur central pour l’arrière lancée.
- Jeu sur grand espace favorisé par deux ailières véloces.
En phase défensive, Bergerac inaugure un système hybride 3-2-1 modulable, inspiré du Cesson-Rennes de 2024. L’objectif : gêner la première passe adverse et déclencher des interceptions.
Focus sur la relation gardienne-contre-attaque
Avec l’arrivée de Bundsen, la relance longue devient létale : 38 % des buts marqués après un arrêt proviennent d’une passe de plus de 20 m. Un atelier spécifique de “baseball-pass” a été créé.
- Analyse vidéo des appuis.
- Travail de renvoi à 45° pendant 12 min.
- Simulation de lecture de trajectoire.
En match de préparation contre Nantes, Bergerac a inscrit 11 buts en transition (score final 32-24). Ce “score-run” a convaincu les sceptiques : l’équipe possède l’arme fatale nécessaire pour surprendre la poule Ouest.
À terme, l’objectif est simple : terminer avec la meilleure différence de buts pour s’assurer d’être repêchée en D2F en cas de réforme de ligue. La tactique devient donc un outil politique autant que sportif.
Rivalités et opportunités : la Nationale 1 féminine comme laboratoire de talents
La Nationale 1 rassemble 36 clubs répartis en trois poules. Chaque groupe abrite des histoires contrastées, des ambitions divergentes et des projets bénévoles ou semi-professionnels. Bergerac croise plusieurs profils.
Les adversaires directs
- Nantes B : réserve talentueuse sans obsession de montée.
- Le Roz-Hand’Du (profil ici) : collectif hétéroclite mais imprévisible.
- Les Granvillaises (dans l’incertitude financière) : variable inconnue.
Ces affrontements s’annoncent électriques, mais la véritable concurrence vient de l’évolution des règlements. Une suppression des barrages est à l’étude, qui favoriserait un ticket direct vers la D2F pour les premières de chaque poule.
Les opportunités de l’environnement N1
La Fédération encourage les échanges interclubs. Bergerac a déjà scellé deux collaborations : une opposition amicale contre le SCO Angers victorieux 42-23 (match référence) et un stage mental avec le Racing Handball Bassin d’Arcachon (lire). Ces croisements créent une émulation collective et décuplent la visibilité nationale du projet.
Perspective intrigante : la COC envisage une “N1 Élite” à huit clubs dès 2027. Bergerac compte s’y inscrire comme membre fondateur. Anticiper les réformes, c’est déjà prendre de l’avance sur le terrain.
Médias, supporters et identité : forger le Bergerac Horizon Handball de demain
Au-delà des victoires, une équipe rayonne par la qualité de son récit. Bergerac l’a bien compris : l’idée “Bergerac Horizon Handball” repose sur une communication 360°.
Storytelling et contenus numériques
- Série documentaire “Cœurs violets” diffusée sur YouTube (six épisodes).
- Podcast mensuel animé par un duo de journalistes locaux.
- Fil TikTok “drills du mardi” : 25 000 vues en moyenne.
Cette stratégie se nourrit de l’engagement communautaire : sondages en story, concours pour désigner le maillot third, immersion dans les coulisses. L’embed Twitter plus haut illustre l’impact : +72 % d’impressions en trois mois.
Expérience fan repensée
Le club adopte un système de billetterie dynamique : prix variables selon l’adversaire, mais avantages fidélité (boisson offerte, accès warm-up). L’opération “Main dans la main” permet à chaque abonné d’inviter un enfant gratuitement – incitation directe à la relève.
L’importance de la mémoire sportive
À l’occasion des 20 ans du club, une exposition retrace le parcours des pionnières D2 2005 : photos inédites, témoignages audio. Le parallèle avec la disparition de François Rongeot à Vesoul rappelle que les racines nourrissent l’avenir.
Le mot clé est cohérence : du parquet aux réseaux, l’image d’un club engagé, accessible et ambitieux consolide la base populaire, prête à galvaniser l’équipe durant les moments clés.
Questions fréquentes sur le projet Ambition N1 Bergerac
Quels objectifs chiffrés le club s’est-il fixés pour la saison 2025-2026 ?
Terminer dans le top 2 de la poule Ouest, dépasser la barre des 500 abonnés et maintenir un budget équilibré autour de 650 000 €.
Comment assister à un match sans se déplacer jusqu’au gymnase Dumesnil ?
Les rencontres à domicile seront diffusées en streaming haute définition sur la plateforme LNH TV, accessibles via un pass saison à 19 €.
La Future Stars Bergerac Academy recrute-t-elle des joueuses extérieures ?
Oui, des détections ont lieu chaque vacances scolaires ; les critères portent sur la motivation, la capacité athlétique et l’esprit collectif.
Le club peut-il refuser une montée en D2F pour raisons financières ?
Non : l’équipe a déjà obtenu une lettre d’intention bancaire garantissant les fonds nécessaires ; seule une réforme fédérale imprévue pourrait bouleverser la progression.
Quel rôle jouent les anciens joueurs professionnels dans le staff ?
Deux consultants, notamment un ancien champion du monde sollicité par Oloron, interviennent ponctuellement sur la vidéo et la préparation mentale, renforçant l’expertise interne.