Jeudi soir, 19h40, gymnase Larochefoucauld de Biarritz. Alors que le soleil se couche lentement, les joueuses de Côte Basque se précipitent vers leur vestiaire transformé en salle de classe improvisée. C’est l’heure de la séance vidéo hebdomadaire orchestrée par Mickaël Moreno, leur entraîneur aux allures de stratège high-tech. Installé au sol avec son matériel ultra-performant – rétroprojecteur, ordinateur de gamer et logiciel Dartfish – le coach s’apprête à dévoiler ses analyses chirurgicales du prochain adversaire. Un rituel devenu incontournable depuis cinq saisons qui permet à l’équipe de disséquer les forces et faiblesses de chaque opposant. Et les résultats parlent d’eux-mêmes : leader de sa poule, Côte Basque doit environ « 30% de ses victoires » à cette préparation méticuleuse.
La salle de classe improvisée : quand le vestiaire devient laboratoire tactique
Dans l’intimité du vestiaire biarrot, douze joueuses s’alignent sagement sur un banc, comme des élèves studieuses. Face à elles, pas un tableau noir mais un mur blanc où se projettent les séquences vidéo minutieusement préparées par leur coach. « On s’organise comme on peut », sourit Mickaël Moreno, tandis qu’il ajuste la projection à travers… un portemanteau!
Cette installation artisanale contraste avec la sophistication de l’analyse proposée. Le coach n’improvise rien : chaque action est disséquée, annotée, fléchée. Les joueuses dangereuses sont entourées, les mouvements décisifs identifiés, les tactiques adverses décodées avec une précision chirurgicale.
Cette approche méthodique repose sur un travail de fond considérable. Voici comment se structure la préparation vidéo des Basques :
- Accès permanent à un cloud partagé entre tous les staffs de N1 contenant les matchs
- Utilisation du logiciel Dartfish pour le montage et l’analyse des séquences
- Séances hebdomadaires d’une demi-heure, généralement le jeudi ou avant-match
- Annotations détaillées et commentaires tactiques intégrés aux vidéos
- Analyse segmentée par phases de jeu (offensive, défensive, grands espaces, coups francs)
« Le but est de les faire déjouer, essayer de les mettre en difficulté, de les perturber aussi bien en attaque qu’en défense », explique Mickaël Moreno, qui n’a rien laissé au hasard pour maîtriser cet outil. Le coach a même suivi une formation spécifique de plus de 30 heures auprès de l’analyste vidéo du PSG Handball.
| Étape d’analyse | Objectif | Méthode |
|---|---|---|
| Visionnage global | Identifier le style de jeu | Observation des tendances générales |
| Séquençage par phases | Repérer les schémas récurrents | Découpage par situations de jeu |
| Annotation tactique | Mettre en lumière les points clés | Utilisation d’outils graphiques |
| Montage personnalisé | Faciliter la mémorisation | Sélection des séquences pertinentes |
De l’ordinateur au terrain : comment la théorie devient pratique
La session du 27 mars dernier illustre parfaitement cette méthodologie. Avant d’affronter Saint-Loubès (victoire 32-36), l’équipe a étudié les images du match de leur futur adversaire contre Mérignac. Rien n’échappe à l’œil du coach : « Elle aime le jeu après coup franc, il faut rester vigilantes et agir rapidement sur elle », s’exclame-t-il en pointant l’arrière gauche croate Milka Divic.
Cette préparation minutieuse n’est pas à sens unique. Moreno favorise l’échange avec ses joueuses : « Il ne faut pas que ce soit quelque chose de descendant mais de partagé pour qu’on puisse construire quelque chose qui nous ressemble. » Cette intelligence collective porte ses fruits sur le terrain.
Les éléments spécifiquement analysés avant chaque rencontre comprennent :
- Les phases offensives de l’adversaire et leurs enchaînements préférentiels
- Les situations de grand espace et les transitions rapides
- L’efficacité sur les jets de sept mètres et les coups francs
- Les joueuses clés et leurs tendances individuelles
- Les systèmes défensifs et leurs ajustements en cours de match
Dans les coulisses de la préparation vidéo : un outil devenu indispensable
Ce n’est pas un hasard si Côte Basque trône au sommet du classement. Derrière cette réussite se cache un travail d’orfèvre réalisé loin des projecteurs. Chaque semaine, Mickaël Moreno consacre d’innombrables heures à scruter les matchs disponibles sur le cloud partagé, armé de son ordinateur ultra-performant.
Le coach ne se contente pas d’un visionnage passif. Il transforme ces images en véritable laboratoire tactique grâce à son expertise technique :
| Fonctionnalité utilisée | Application pratique | Bénéfice tactique |
|---|---|---|
| Zooms ciblés | Isoler les mouvements clés | Meilleure compréhension des détails |
| Annotations graphiques | Visualiser les trajectoires | Anticipation des déplacements |
| Ralentis techniques | Décortiquer les enchaînements | Identification des timings adverses |
| Séquences comparatives | Repérer les habitudes | Exploitation des schémas récurrents |
« Plus on sera assidus là-dedans, plus on aura de chances de mettre nos concurrentes en difficulté », affirme Moreno, conscient que ce travail de l’ombre représente un avantage concurrentiel décisif dans une N1 de plus en plus relevée.
Les joueuses reçoivent également un accès à ces analyses pour se familiariser avec le jeu adverse avant même la séance collective. Cette préparation personnalisée permet à chacune de :
- Identifier ses duels directs et anticiper les forces/faiblesses de son adversaire
- Mémoriser les systèmes défensifs à mettre en place selon les situations
- Comprendre les consignes tactiques qui seront appliquées lors du match
- Visualiser mentalement les scénarios de jeu avant la rencontre
- Participer activement à l’élaboration de la stratégie collective
Des résultats probants : quand l’analyse devient un atout majeur
Les chiffres ne mentent pas : leader de sa poule avec 47 points, Côte Basque récolte les fruits de cette préparation méticuleuse. Comme le souligne leur entraîneur : « Certes, il y a toujours l’activité des filles, ce sont quand même elles qui jouent, mais je pense que ça peut tout de même correspondre à 30% de nos victoires. »
Cette approche analytique a notamment permis à l’équipe de surmonter des obstacles majeurs cette saison :
- Victoire arrachée sur le fil à l’aller contre Bléré-Val de Cher (30-29)
- Domination écrasante au retour face au même adversaire (39-23)
- Succès stratégique contre leur bête noire Mios-Biganos
- Victoire calculée à l’extérieur face à Saint-Loubès (36-32)
- Résistance face à la pression d’Angoulême dans la lutte pour le podium
La prochaine confrontation contre Mérignac (4e, 45 points) constituera un nouveau test pour cette méthodologie qui transforme l’information en performance. Les joueuses de Côte Basque ont déjà commencé à analyser leurs futurs adversaires en visionnant leur match contre Saint-Loubès.
La vidéo comme pilier d’une méthode collective unique
Ce qui distingue l’approche de Mickaël Moreno, c’est sa dimension participative. Loin d’imposer ses vues, le technicien basque construit une intelligence collective en impliquant ses joueuses dans l’analyse. « Il ne faut pas que ce ne soit pas quelque chose de descendant mais de partagé pour qu’on puisse construire quelque chose qui nous ressemble », insiste-t-il.
Cette philosophie collaborative se manifeste à plusieurs niveaux :
| Aspect collaboratif | Mise en œuvre | Impact sur l’équipe |
|---|---|---|
| Échanges pendant la séance | Questions-réponses sur les séquences | Appropriation des consignes |
| Accès anticipé aux analyses | Partage des vidéos avant la séance | Préparation mentale optimisée |
| Retours d’expérience | Débriefing post-match avec vidéo | Progression continue |
| Construction collective | Intégration des suggestions des joueuses | Adhésion au projet de jeu |
Cette méthode, inspirée des pratiques professionnelles, s’adapte aux contraintes d’une équipe de N1 dont les joueuses jonglent entre carrière sportive et vie professionnelle. La séance du jeudi soir symbolise parfaitement cette réalité : certaines arrivent du travail, d’autres sortent tout juste des cours.
Les bénéfices de cette approche dépassent le simple cadre tactique :
- Développement d’une culture commune et d’un langage partagé
- Renforcement de la cohésion d’équipe autour d’objectifs clairement identifiés
- Responsabilisation des joueuses qui deviennent actrices de leur préparation
- Création d’un environnement d’apprentissage permanent
- Adaptabilité tactique accrue face aux situations imprévues
Un modèle d’analyse qui inspire au-delà du terrain
La méthode développée par Mickaël Moreno a des répercussions qui dépassent le cadre du simple résultat sportif. Elle instille une culture de l’analyse et de la préparation qui transforme l’approche des joueuses face aux défis. Cette dimension éducative pourrait expliquer pourquoi l’équipe progresse de manière si constante.
Voici comment cette philosophie se traduit concrètement :
- Transfert de compétences analytiques utilisables dans la vie professionnelle
- Développement de l’intelligence de jeu et de la lecture tactique
- Capacité accrue à identifier et résoudre des problèmes complexes
- Culture de l’amélioration continue et de l’autoévaluation
- Préparation mentale optimisée grâce à la visualisation
À l’heure où Côte Basque s’apprête à affronter Mérignac ce samedi à 20 heures à la salle Pierre-de-Coubertin, cette préparation minutieuse constitue un atout majeur. Le duel entre le leader (47 points) et le quatrième (45 points) s’annonce passionnant, d’autant que chaque point compte dans la course au titre.
| Équipe | Classement | Points | Forces identifiées |
|---|---|---|---|
| Côte Basque | 1er | 47 | Préparation tactique, cohésion |
| Mérignac | 4e | 45 | Jeu rapide, efficacité offensive |
| Angoulême | 3e | – | Défense solide, expérience |
| Rochechouart | 2e (ex-aequo) | 47 | Inconstance, défaites récentes |
Pour ce match crucial, l’équipe basque pourra compter sur un groupe au complet avec Gouzien et Legros dans les buts, ainsi que des joueuses clés comme Iralde (capitaine) ou encore Bouquet, qui s’est imposée comme un élément majeur depuis son arrivée d’Octeville-sur-Mer à l’intersaison.
